Elle transmet sa maison à ses enfants : ils l’ont poussée dehors dix ans après en toute légalité – le piège de l’usufruit révélé

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Brigitte a donné sa maison à ses enfants tout en gardant l’usufruit. Dix ans plus tard, ils l’ont contrainte à partir en toute légalité.

Peut-on légalement forcer un parent à quitter une maison qu’il a donnée ? Découvrez comment l’usufruit peut se retourner contre les parents.

Transmettre son bien immobilier à ses enfants tout en souhaitant y vivre jusqu’à la fin de ses jours : une stratégie souvent choisie par des parents soucieux d’organiser leur succession.

Mais cette pratique, qui repose sur la combinaison de la nue-propriété et de l’usufruit, peut parfois se retourner contre le donateur… comme ce fut le cas de Brigitte, une mère de famille bordelaise contrainte de quitter sa maison dix ans après l’avoir transmise à ses enfants. Et ce, en toute légalité.

Elle leur cède la nue-propriété, conserve l’usufruit

En 2010, à 68 ans, Brigitte décide d’anticiper sa succession. Avec l’aide de sa notaire, elle opte pour un mécanisme fiscalement avantageux : elle donne la nue-propriété de sa maison à ses trois enfants — Sarah, Camille et Alexandre — tout en conservant l’usufruit, c’est-à-dire le droit d’habiter le bien ou d’en toucher les loyers.

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« À son âge, l’opération était intéressante : la nue-propriété représentait 60% de la valeur totale du bien, indique Coralie Daven, ancienne notaire de Brigitte et fondatrice d’une plateforme dédiée à la compréhension du droit.

Grâce aux abattements fiscaux, ses enfants « n’ont quasiment rien payé en droits de donation » pour cette maison de 100 mètres carrés estimée à 600 000 euros.

Sur le papier, tout semble parfait : elle reste chez elle, ses enfants héritent en avance, et la famille évite les frais futurs. Mais c’est sans compter le cauchemar qui s’ensuit.

L’usufruit, un droit fragile

Une décennie plus tard, Brigitte file le parfait amour avec un homme vivant à Toulouse. Elle commence à passer de longues périodes chez lui, s’absentant fréquemment de sa maison à Bordeaux. « Dans les faits, elle passait de plus en plus de temps chez lui », relate Coralie Daven.

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Ses enfants, avec qui les relations se sont tendues, profitent de cette opportunité pour lancer une procédure de conversion de l’usufruit en capital.

Ce mécanisme est prévu par le Code civil. « Cela permet (effectivement) de transformer le droit d’usage en indemnisation financière en cas d’absence prolongée ou d’abandon du bien ». Après un passage devant le juge et plusieurs mois de procédure, les enfants obtiennent gain de cause.

Une décision légale, mais brutale

Le tribunal considère que Brigitte n’utilise plus la maison comme résidence principale. Elle est donc forcée d’abandonner son droit d’usufruit, en échange d’une compensation. À 78 ans, ce droit ne représente plus que « 30 % de la valeur de la maison », ce qui lui rapporte environ 150 000 euros, après déduction des frais.

Avec cette somme, Brigitte s’achète un petit appartement à Toulouse. Mais le lien familial est brisé : elle ne revoit plus ses enfants, ni ses petits-enfants.

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Une clause dans l’acte notarié aurait pu limiter la possibilité de conversion forcée de l’usufruit. « En tant que notaire, j’aurais conseillé à Brigitte d’inclure dans l’acte notarié : une clause d’interdiction formelle de vendre la nue-propriété sans son accord préalable et une clause limitant la conversion forcée de l’usufruit. Il est effectivement possible de prévoir, dans un contrat privé, une restriction de cette conversion » dans le respect des « conditions imposées par le Code civil (article 759) et les principes d’ordre public ».

Brigitte aurait pu choisir une donation temporaire d’usufruit ou une donation-partage assortie de clauses protectrices.


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