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Harcèlement scolaire : "Accompagner ces ados à cicatriser ces blessures"

ENTRETIEN. Psychopédagogue et enseignante à l'école, Sandrine Rochet accompagne aussi des familles et enfants avec l'association Écoute-moi, protège-moi et aide-moi. Elle décrypte pour nous ce qu'est le harcèlement scolaire.


Auteur de l'article : Harcèlement scolaire : "Accompagner ces ados  à cicatriser ces blessures"
Rédigé par Clicanoo

Comment se produit le harcèlement scolaire ?
"Il faut d'abord comprendre ce qu'est le harcèlement scolaire, à savoir de la violence répétée. On le définit sous quatre formes de violences : le harcèlement physique, où il y a une atteinte au corps, le harcèlement moral, qui se manifeste par des insultes, des rumeurs, des injures et des moqueries mais aussi par les rires, les soupirs, les regards appuyés. Il y a ensuite le cyberharcèlement et le harcèlement sexuel comme le viol, les agressions. On va parfois, souvent même, observer des fusions de plusieurs formes de harcèlement dans la cour de l'école, des collèges et des lycées. Et comme une feuille de papier qu'on froisse, on aura beau la défroisser, il y aura toujours des traces.


Cela s'aggrave-t-il au collège ?
Ce qu'on remarque, c'est qu'il y a un changement en sixième car les élèves vont être accompagner par les adultes de manière différente. Il y aura moins d'écoute. Le phénomène de groupe est aussi important. Il y a une fragilité accumulée dès l'élémentaire sur laquelle il faut être plus vigilant. Il suffit qu'un élève change d'établissement et n'a plus de repère pour devenir une cible. Il faut donc de l'action et une vraie reconnaissance de ce mal-être. Il faut soigner et accompagner de manière active. Dès la sixième, le cyberharcèlement devient de plus en plus fort puisqu'en primaire, l'enfant n'a que très rarement accès au téléphone et aux réseaux sociaux, contrairement au collège.


"Certains préfèrent être à leur place plutôt que celle de la personne qui souffre"

Comment expliquer ce phénomène de groupe ?
Il est question ici d'élèves qui vont avoir des comportements qu'ils n'avaient jamais eu avant mais qui suivent les autres pour ne pas risquer d'être isolés. Ils se demandent souvent d'ailleurs s'ils ont le choix de faire autrement. Mais quand on veut être populaire, la question à se poser, c'est surtout à quel prix ? Certains préfèrent être à leur place plutôt que celle de la personne qui souffre. Et c'est un point sur lequel il faut travailler au collège.
L'une des mesures du gouvernement, qui devrait être mise en place à la rentrée prochaine, consiste aussi à nommer un adulte référent harcèlement dans chaque établissement.
C'est déjà le rôle des assistants scolaires et des infirmiers mais il y en a quand même assez peu dans les établissements. Est-ce qu'ils sont assez bien formés ? Il a des ressources autour et il faut les solliciter pour les formations. Nommer un référent, oui, mais avec des vrais compétences.


"Il peut se reconstruire et pouvoir reprendre confiance en toute les personnes qui sont autour de lui"

Comment passe-t-on du statut d'élève à celui de victime ?
Il faut savoir que par rapport à une situation de violence, chacun réagit différemment. Une personne va être plus ou moins sensible, en fonction de la situation. Certaines personnes ont assez confiance en elles pour ne pas perdre le contrôle. Et lorsqu'il y a une forme de domination, le harceleur voit que la personne en face réagit comme il le souhaite, et continue donc ce rapport de force. Aussi,  quand des enfants ont vécu des traumatismes dans la sphère familiale, ils vont réagir d'une certaines manières plutôt qu'une autre. Les situations de harcèlement doivent être comprises de manière globale, autant par les enfants que par les enfants. Certains adultes, sans prendre conscience, vont considérer que l'humiliation est bénéfique pour apprendre mais il faut être vigilant sur notre manière de réagir.


Un enfant peut-il sortir indemne d'une situation de harcèlement ?
Tout est possible et rien n'est définitif. S'il arrive à prendre conscience que tout ce qu'on lui a dit n'était pas une vérité et à prendre du recul, il peut se reconstruire et pouvoir reprendre confiance en toutes les personnes qui sont autour de lui. C'est possible s'il arrive à trouver un adulte en qui il a confiance. L'idée est d'accompagner ces ados à cicatriser ces blessures mais il faut lui faire comprendre que ces cicatrices ne le définissent pas. On peut réagir de manière résiliente mais cela ne veut pas dire qu'on est toujours une victime.


Quels conseils auriez-vous à donner ?
Pour les enfants et les parents, il ne faut pas hésiter à alerter suffisamment tôt. Il ne faut pas hésiter à aller chercher des réponses au-dessus d'eux. Il ne faut pas hésiter à trouver une écoute et à chercher un accompagnement. Car ces situations de violences, il ne faut pas les banaliser."


Propos recueillis par Pauline Benard

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