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10 boîtes sardines au banc d'essai

Connaissez vous le théorème du carême ? Si « carême » égal « poisson » et que « poisson » égal « cher » alors « carême » égal sardine en boite ! Si vous voulez faire des infidélités à Robert, nous avons testé 9 autres marques pour vous.


Auteur de l'article : 10 boîtes sardines au banc d'essai
Rédigé par Alexandre Begue

Evidemment, on n’attend pas les vendredis de carême pour manger du poisson. Si on met de côté la question du prix, d’ailleurs, la morue est en pôle position des préférences locales pour le rougail du vendredi. La sardine Robert pour sa part était déjà la star historique des « rayons tôles » des supermarchés longtemps avant la disparition du système d’ouverture à clé, accessoire utilisé à l’époque où les conserves étaient soudées à l’étain.
La sardine Robert, une des rares conserves entrée dans la tradition culinaire réunionnaise avec la « boîte Pilchard », fait aujourd’hui partie des produits les plus vendus en GMS. Pas besoin de tableaux Excel pour le savoir : quand elle vient à manquer, les autres marques sont encore disponibles. Certains préfèrent même se priver en attendant le réassort plutôt que de tenter les alternatives.

La Robert mérite-t-elle vraiment cette omnipotence ? Pourquoi est elle la préférée des Réunionnais ? Pour le savoir, nous avons sélectionné d’autres marques dans les trois grandes surfaces du Nord, Carrefour, Run Market et Leclerc, afin de les soumettre à une évaluation sur plusieurs critères : la présentation, la facilité d’ouverture, l’odeur, la texture et le goût. 
Si la boîte Robert n’est pas la plus esthétique du lot, certaines sont bien moins lisibles. Sa couleur metallique spécifique est identifiable au premier coup d’oeil. 
Concernant leur texture, les sardines Robert sont dans la moyenne. Ni trop dure, ni trop sèche, ni trop moelleuse, la mâche est équilibrée et consensuelle. L’odeur en revanche se situe à une position de curseur plutôt élevée, avec Cap Rousset, Les délectables et Pêche Océan, cette dernière marque s’offrant l’originalité de notes fumées.
La bouche suit le nez. Les « Robert » jouent sans filet. La saveur est franche et directe, ce qui leur enlève les côtés plus raffinés que peuvent avoir leurs concurrentes joliment emballées.

Salées
Les Robert laissent en effet la première place du goût à la marque Connétable par exemple. Le joli packaging, la texture moelleuse des sardines, dont la saveur délicate est gratifiée d’une finale légèrement acidulée et modérément sèche, a remporté notre suffrage. Dans le même esprit, on retrouve les sardines Capitaine Cook. Ces dernières sont un peu plus sèches en revanche, et leur saveur aux notes iodées peut surprendre ou ne pas plaire. Avec la marque Odyssée, ce sont les seules sardines conditionnées en Bretagne. Toutes les autres l’ont été au Maroc.
Il se murmure par ailleurs qu’à l’instar des bons vins, la sardine se bonifierait avec le temps dans sa boîte, sachant que celle-ci peut se garder une décennie ou deux.
Côté matière grasse et sel, notre sardine fétiche ne fait pas dans la dentelle : 15 grammes de matière grasse égoutée, et le sel à 1,2g qui dépasse tout le monde. Ce dernier joue à fond son rôle d’exhausteur de goût, et on sait que le palais des Réunionnais est plutôt réceptif aux saveurs soutenues, parfois trop concernant le chlorure de sodium. Enfin, notre sardine «historique» est assez peu sèche, avec une finale peu astringente comparée à certaines concurrentes.

En fonction de tous ces éléments, on peut comprendre pourquoi la sardine Robert est si appréciée des Réunionnais, au-delà de son prix attractif. Sa texture équilibrée et sa saveur prononcée sans être vraiment agressive sont idéales pour confectionner la fameuse « sauce sardine », qu’elle teinte gustativement, tout en « fondant » un peu, mais pas trop. En compagnie de brèdes mourongue, la morue trouve du répondant gustatif tout en ajoutant du moelleux au plat.
Même comportement dans le pain, dont la mie absorbe le côté gras des poissons, avec modération pour peu qu’on les aient bien égoutés avant. Ajoutez deux queues d’oignons verts, un cornichon, et une cuillérée de rougail tomate « au pilon », et votre sandwich à la sardine Robert fera des envieux !

Que cela ne vous empêche pas de découvrir d’autres marques et multiplier les plaisirs, surtout avec les versions arômatisées à la tomate, au piment, au gingembre. En effet, on ne va pas se mentir, globalement, le goût de base est presque le même partout dans notre échantillon, excepté pour les palais entraînés qui vont saisir ici et là quelques subtilités, et chez des marques « qualitatives » un peu plus raffinées. Seules les textures peuvent varier, en fonction du gabarit des poissons, de la quantité d’huile dans laquelle ils ont trempé, et du temps de macération. Bon appétit !

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La sardine en conserve, une histoire française

Les premières conserves de sardines remontent au début du XIXe siècle. Au XVe, déjà, les sardines conservées en saumure ou fumées étaient exportées de Bordeaux et de Nantes. Les différents modes de conservation profitent de la révolution amenée par la découverte de Nicolas Appert en 1795, qui consiste à détruire les micro-organismes par la chaleur avant de conserver les aliments dans un récipient étanche. Le poisson, dont les sardines, sont concernés au premier chef. 

La plus ancienne conserve de sardine est nantaise, fabriquée par un certain Joseph Colin, confiseur. Le XIXe siècle, l’autre révolution, industrielle celle-ci, propulse les conserveries. La famille Colin fait des émules. Dans les années 1830, le secteur de la conserve s’agandit. Les fameuses boîtes en métal font leur apparition, les femmes de marins les remplissent de sardines, ce qui permet de varier les rations alimentaires des ouvriers. Les premières conserves s’exportent jusqu’aux Etats-Unis, où elles iront nourrir les yankees pendant la guerre de Sécession. En 1850, 25 conserveries sortent 3 millions de boîtes. Pas loin de 30 ans plus tard, ce chiffre passe à 82 millions, avec 150 fabriques installées du Finistère à la Vendée. Dans les années 1920, le thon et le maquereau rejoignent la sardine dans les conserveries.

De nos jours, le plus gros exportateur de sardines en boîte est le Maroc, comme on peut le constater dans notre sélection. Plus de 152 000 tonnes de conserves ont quitté ce pays en 2022, où la pêche de la sardine est une également une activité économique de première importance. 

(Source : Syndicat Français des Conserveries de Poissons)

Dans le giron d’un géant

La Sardine Robert, via Saupiquet racheté en 1999, appartient à Bolton food, division alimentaire du groupe italien Bolton, créé en 1949. Ce groupe dont on entend très peu parler joue dans la cour des très grands, jugez plutôt : il est présent dans 146 pays, officie aussi dans les produits d’entretien (Génie), les adhésifs (UHU), la cosmétique et soin du corps (Sanogyl), emploie 11 000 personnes, possède 15 usines et 16 navires de pêche dans le monde entier. Des chiffres de 2015 indiquent plus de 2 milliards de chiffre d’affaire (300 millions en France), 3,2 milliards en 2022.
Les produits alimentaires constituent néanmoins l’essentiel de l’activité du géant (57%). Ses marchés principaux sont l’Italie, la France et l’Espagne.


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