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Jazz : Eloquent Black Lives pour créer l’événement !

Suite du Festival du Téat Plein Air ce soir, avec, en amont du concert, petite conversation avec Reggie Washington l’instigateur du projet Black Lives ( sous entendu Matter) et son acolyte de longue date, Jacques Schwartz-Bart, rejoints par le poète et rappeur Sharrif  Simmons et le jeune DJ Grazzhoppa, pour nous parler de la philosophie et de la musique de leur groupe devenu, mythique, et qui avant de débarquer à la Réunion donnait un concert en Pologne.

Les aînés des Black Lives, le saxophoniste Jaques Schwartz-Bart, le bassiste et fondateur Reggie Washington, le poète et rappeur Sharrif  Simmons et le plus jeune, DJ Grazzhoppa.
Les aînés des Black Lives, le saxophoniste Jaques Schwartz-Bart, le bassiste et fondateur Reggie Washington, le poète et rappeur Sharrif  Simmons et le plus jeune, DJ Grazzhoppa.

Auteur de l'article : Jazz : Eloquent Black Lives pour créer l’événement !
Rédigé par Clicanoo

Bien envie de savoir comment tout ça a vraiment commencé ( même si on en a déjà une petite idée) de la bouche du premier concerné par les Black Lives, Reggie Washington, qui en l’absence de sa douce moitié, restée à Bruxelles où elle assure son métier de productrice, ne se fait pas prier . «  C’est elle qui, pendant la pandémie, en a eu l’idée, Stefany Calembert, Mrs Washington, qui, dans la vraie vie forme avec moi un couple bi-racial ! » précise le bassiste pour pointer l’expérience endurée par sa femme, depuis des années, face au racisme subi par son mari et leurs trois filles.. « En fait un racisme qui, des Etats-Unis, d’où je viens à proliférer partout dans lemonde et en Europe. En Belgique où je vis avec ma famille, dans notre voisinage, nous sommes entourés d’une population de Sénégalais, de Turcs, de réfugiés et de migrants qui subissent tout le temps les interventions de la police…for no reason ! Oui, sans raison ! Nombre d’entre eux sont nos amis et Stéfany, pendant le creux de la vague imposé par le Covid, s’est mise à chercher ce qu’on pourrait bien faire pour les aider … Réponse : ce qu’on sait tous faire le mieux, mettre nos musiques ensemble et préparer un disque, en contactant tous les musiciens avec qui nous travaillons depuis des années » Résultat ? 25 compositeurs et leaders se sont déclarés partants.  « Jacques Swartz-Bart le premier avec qui nous avons partagé la plupart des tournées de notre carrière et fait un nombre incalculable de disques ensemble un peu partout y compris au Mali. L’idée d’un enregistrement s’est affinée sur place, à Bruxelles, avec les plus proches, les autres ont envoyé leurs bandes et,  c’est ainsi qu’est né, un double album « From generation to génération ».

 Le poids des mots …

Et  par la même occasion, un vrai orchestre plutôt qu’un collectif qui depuis, au hasard des dispo et des contrats des uns et des autres  se déplace en formation allant du quintet au band d’une quinzaine de personnes . Et Jacques le saxophoniste d'ajouter, pour préciser l’esprit maison, ce qui est important « Plus qu’un groupe, nous sommes une famille, une tribu , car nous sommes tous pères, mères et même grand-parents, avec une tripotée d’enfants qui marchent dans nos pas, allègrement, depuis leur naissance ! ».  Ceci dit en pensant, forcément, à son fils Ezra qui, à 16 ans, a déjà tous les talents et joue comme un pro.

De ce vaste ensemble aux styles métissés témoignant de l’ampleur et de l’ardeur de la musique noire contemporaine pour incarner sa différence et véhiculer son identité est né  donc un opus militant, assurément, et politique tout autant que poétique, Sharrif Simmons le musicien des Black Lives et l’un des auteurs et porte-parole, par ailleurs du mouvement  des Last Poets s’en porte garant. Cette formation All-Stars  est furieusement expressive et superbement fédératrice d’une communauté dont la créativité  aussi diverse que variée fait l’honneur, entre verbe et mélodie de la diaspora africaine. «  La voix », confirme Sharrif  « est aussi importante  pour poser les idées, et  commenter les situations , sachant que, certes, la musique représente une façon de voir et de présenter les choses  mais que la voix en est une autre. Comme disait le romancier James Baldwin  en 1962 dans un essai publié dans le New York Times : « Not everything that is faced can be changed but everything cannot be changed until it is faced ». Une phrase qui « rings a bell » dans notre  mémoire de soixante-huitarde étudiante en  littérature anglo-saxonne et américaine à la Sorbonne,  et nous incite à traduire ce message explicité par « on ne peut certes pas changer  tout ce qu’on doit affronter seulement rien ne risque d changer si on ne l’affronte pas ! »

La Réunion aux premières loges 

Commentaire de Mr. Simmons « Exactement ! ».  Il nous en sortira d’autres et de belles, ce soir en jouant les rappeurs sur la scène des Black Lives (ce qu’il fait aussi bien en français qu’en anglais) « par que depuis le temps, je suis devenu bilingue », précise le poète en souriant.  Quant on leur demande à tous si la partition d’un concert n’est pas trop compliquée, avec tout ce monde, à fixer ? Ils répondent en choeur et en souriant que « c’est une vraie chance d’avoir trop de musiques à choisir pour  s’exécuter  vu que nous avons des concerts multiples et variés à assurer,  tout le temps ! Alors on ne risque pas de se répéter. Côté organisation, c ‘est Stéphany qui gère et à nous le gâteau à se partager, soit trouver les airs qui vont nous enchanter, nous en premier, et vous aussi, on peut l’espérer ! (rires) tout comme le public du New Morning, du Jazz à Marcia ,  puis à  Sète et à Milhau où nous allons bientôt pour un printemps français ! » Autre raison de sourire (ce qu’ils font tous ici depuis leur arrivée dans une île où ils n’avaient, à part le sieur Schwartz-Bart, jamais mis les pieds),  après leur premier projet discographique, les Black Lives ont bichonné un nouvel album collectif,  « People of Earth » réunissant autour de  ces quatre-là une partie des musiciens du premier volume (Tutu Poane, Sonny Troupé, Jean-Paul Bourelly, Arnaud Dolmen…) et quelques nouveaux, dont le saxophoniste Pierrick Pedron. Une vraie pépite pour le public sensible aux propos politiques comme aux musiques choisies par un groupe qui n’a plus rien d’anecdotique . C’est le cas de celui de la Réunion qui va être le premier à découvrir et saluer l’album, la sortie mondiale de l’album ayant lieu ici, ce soir à l’occasion de leur concert pour Jazz en l’Air :) 

Marine Dusigne

En bref…

 Transmission !

 Les Black Lives ne vont pas quitter l’île juste après leur concert mais rester quelques jours encore, la semaine prochaine pour assurer masse classes et ateliers  notamment à L’EMA de Saint-Leu et au Conservatoire. Et il y a fort à parier que des boues vont fuser un peu partout dans  notre petite France de l’océan indien  connaissant  le sens de l’accueil et la fièvre des partages qui caractérise nos jazzmen péï. Encore une fois, pour ne rien louper,  il faudra  trouver le  bon endroit pour en profiter. 


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