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Robert Chicaud : "La ferveur populaire est pour beaucoup dans l’attraction que suscite le Grand Raid"

Il a été l’emblématique président de l’Association Grand Raid durant près de 23 ans. Robert Chicaud a fortement contribué, par son investissement comme sa truculente personnalité, à faire du Grand Raid un événement populaire auquel les Réunionnais sont profondément attachés et qui fait rayonner l’île dans le monde entier. Il nous partage, non sans une pointe d’émotion, son histoire et ses souvenirs.


Auteur de l'article : Robert Chicaud : "La ferveur populaire est pour beaucoup dans l’attraction que suscite le Grand Raid"
Rédigé par Clicanoo

Comment est née votre histoire avec le Grand Raid ?
Robert Chicaud : Dans un premier temps, elle est née sur le terrain en participant à l’épreuve en tant que compétiteur. Le départ se faisait alors de Saint-Philippe et l’arrivée à La Possession. Mes performances, ou plutôt mes résultats, étaient pour le moins peu glorieux. Je crois que pour ma première participation, j’étais dans les derniers.
En 1993, j’ai fait la connaissance de Jean-Pierre Charron au moment où il prenait la suite de Didier Le Méhauté à peine sept semaines avant la date du départ. A l’époque, j’étais avocat et ma photocopieuse fut mise à contribution. Je sollicitais certains de mes clients pour obtenir une aide pécuniaire. Jean-Pierre Charron fut président de 1993 à 1995 puis a passé les rênes à Michel Noël jusqu’en 1998. J’ai ensuite pris la présidence de l’association Grand Raid jusqu’en 2021. Et tous les ans, le comité directeur devait réélire le bureau.

Quelle vision aviez-vous à l’époque et comment l’événement a évolué au fil des années ?
Au début, le Grand Raid se voulait une épreuve sportive réservée aux locaux ce qui explique qu’ils occupaient régulièrement les premières places. Notre philosophie était simple et consistait à accueillir toutes les personnes sans restriction ni discrimination. Il fallait simplement avoir l’âge minimum et fournir un certificat médical. Puis, au fil du temps, le bouche-à-oreille a fonctionné, les médias se sont pris au jeu et la course a pris de l’importance jusqu’à attirer de plus en plus de coureurs de métropole et même du monde entier.
Je pense que la ferveur populaire est pour beaucoup dans l’attraction que suscite cet événement. Cette ferveur est perceptible au travers de l’enthousiasme des bénévoles et de la fidélité des partenaires. Quant au comportement de l’équipe dirigeante, elle fonctionnait sur la base de deux critères : humilité et respect.

Quel regard portez-vous aujourd’hui, avec plus de recul, sur ce que représente le Grand Raid à La Réunion et dans le monde ?
Nous avons pris conscience de ce que représentait le Grand Raid à partir du moment où nous avons dû refuser des inscriptions et, par voie de conséquence, instaurer des quotas pour à la fois conserver la vocation régionale initiale de l’événement tout en l’ouvrant vers l’extérieur. Depuis, le Grand Raid a certes évolué mais reste pour autant fidèle à sa vocation première : permettre au plus grand nombre de coureurs de prendre du plaisir en toute sécurité et donner envie à ceux en provenance de l’extérieur de revenir pour se mesurer à l’une des épreuves ou simplement comme touristes.
Depuis le début de cette aventure, nous avons évolué dans un cadre associatif que nous avons maintenu quand d’autres ont fait le choix d’en tirer profit. Il ne s’agit pas d’une critique mais d’un constat. Pour autant, il n’est pas impossible de penser que notre volonté d’avancer sans but lucratif nous a permis de nous différencier d’autres courses en privilégiant la spontanéité et la chaleur de l’accueil réservé par les bénévoles réunionnais. Et bien entendu, la beauté des paysages comme la technicité du parcours participent grandement à la notoriété du Grand Raid.

Quels sont vos souvenirs, bons comme mauvais, les plus marquants ?
C’est une question difficile car ma réponse serait interminable tout en prenant le risque d’oublier de citer celles et ceux qui ont contribué à la notoriété du Grand Raid. Pour rester dans des généralités, l’histoire retiendra que le Grand Raid est né de l’initiative et de l’implication de la gendarmerie car en 1988 deux gendarmes, Tarlet et Jean-Claude Kocajda, confirment la faisabilité de traverser l’île du Sud vers le Nord. Puis le commandant du PGHM, Jean-Jacques Mollaret, associé à Didier Le Méhauté, a impulsé la Marche des Cimes. C’est d’ailleurs Gilles Trousselier, gendarme à Chamonix, qui a remporté cette première épreuve.
Par ailleurs, nous n’insistons jamais assez sur le rôle prépondérant joué par les bénévoles qui sont présents sur chaque poste, assurent la sécurité et l’encadrement médical.
Je garde également sans conteste en mémoire les années 2002 et 2012 qui ont été marquées par des décès de compétiteurs. Car même si les enquêtes n’ont révélé aucune défaillance de l’organisation, il n’en reste pas moins que le deuil a été difficile et que l’organisation fut très affectée par ces situations extrêmes auxquelles nous n’étions pas préparés.
Pour ce qui est des bons souvenirs, ils sont foison ! Je pense à l’arrivée main dans la main de Thierry Técher et Gilles Diehl en 2000 ou, plus récemment, de François D’Haene et Benoît Girondel en 2018. Mais en ce qui me concerne, les souvenirs auxquels je suis le plus sensible se puisent dans le bonheur affiché par le compétiteur lambda à l’arrivée ou la reconnaissance spontanée de la population. Quoi qu’il en soit, mon expression est insuffisante à traduire la réalité de ce que le Grand Raid fut pour moi durant ces 26 dernières années.

Que souhaitez-vous au Grand Raid de La Réunion dans les années et décennies à venir ?
Ma qualité d’ancien président ne me prédispose pas à pronostiquer le devenir du Grand Raid. Tout au plus, je peux formuler le vœu de garder en mémoire l’origine du Grand Raid, dont le socle repose sur des valeurs de solidarité et de fraternité. Sans oublier que la notoriété, une fois acquise, s’entretient au travers d’initiatives concourant à faire de la Diagonale des Fous la plus belle et la plus difficile des courses de montagne.


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